Pelé for ever par Jaïr

Le roi est mort
On le savait depuis des mois, on se rapprochait d’une fin inéluctable, on n’est pas du genre à pleurer et encore moins à prier, simplement à se souvenir de nos émerveillements de jeunes footballeurs, ou jeunes téléspectateurs, quand il incarnait magnifiquement le seul, le simple plaisir de jouer.
Avec cette apothéose, la Coupe du monde 1970 au Mexique.
Pourquoi celle-là et pas celle d’hier au Qatar avec l’enchanteur Messi, pourquoi celle-là et pas celle d’avant-hier au Mexique également avec le sombre Maradona, si humain, trop humain avec sa main ?
Parce que, le 21 juin, porté par son compère Jairzinho, son visage éclate d’une joie d’enfant : il est redevenu Edson Arantès do Nascimento, le gamin de Três Corações qui dribblait tout le monde lors de “peladas”, ces parties sur terrain pourri qui lui donnèrent son inoubliable nom.
Oui, il sera temps, pour se consoler, de relire Pelé, une vie, le football le monde de François Thébaut.
On pourra aussi réciter par cœur les sommets d’une carrière débutée si jeune, à 16 ans à Santos, la banlieue portuaire de São Paulo.
Sa première Coupe du monde à 17 ans, son but en finale, un ballon par-dessus la tête du défenseur Gustavsson suivi d’une reprise de volée, et vlan !
Il y en aura plus de 1200, on ne va pas dire le chiffre exact, on aime moins ici les chiffres de la statistique que les gestes qui s’inscrivent dans la mémoire.
Comme ce tir depuis le milieu du terrain pour lober le gardien tchèque Viktor.
Comme ce grand pont sur le gardien uruguayen Mazurkiewicz qui en perd la tête avant de voir le ballon raser l’extérieur de son poteau ou cette tête contre l’Angleterre – qui défendait son titre, aidée en cela par Jatchev et Morais qui avaient “éliminé” le champion du monde – ponctuée d’un arrêt incroyable du gardien de but qui a fait dire à Pelé : « J’ai marqué un but mais Banks l’a arrêté ».
C’est vrai, le Mundial 1970 a marqué les esprits à plus d’un titre.
Il fut pour la première fois transmis sur toute la terre, et en couleurs SVP. Marqué aussi par un horaire souvent tardif pour la France mais parfois avec un soleil vertical sur l’archi-comble stade Aztèque de Mexico.
Et par cette demi-finale à renversements RFA (on ne disait pas encore Allemagne)-Italie.
Et puis cette passe sans regarder à Carlos Alberto, comme s’il avait des yeux dans le dos, le Brésilien, pour sceller le sort d’un match de légende.

Pelé, c’est l’homme qui a fait du porteur du numéro 10 un joueur à part, ce ne sont ni Platini ni Neymar ni le Mbappé des Bleus qui le contrediront.
Pelé, c’était le danseur de batucada sur une pelouse verte, le joueur qui a importé « ce jeu merveilleux » dans la partie nord de son continent en finissant sa carrière au New York Cosmos.
Allez savoir si « dans le ciel qui n’existe pas » comme le chante Jacques Brel les anges ne porteront pas bientôt un maillot jaune, short bleu et bas blanc plutôt qu’une auréole.
Photos du Miroir du Football numéro 135 de Juillet 1970



Banks....for ever


Archives Faouzi Mahjoub